20 octobre 2022

Position de la FIM sur la révision du Règlement produits de construction

Contexte

Dans le cadre du plan d’action de l’UE pour l’économie circulaire, issu du Pacte vert pour l’Europe, la Commission européenne a publié le 30 mars 2022 sa proposition de révision du Règlement n°305/2011 sur les produits de construction.

Du point de vue de la Commission européenne, ce projet vient traiter plusieurs problématiques identifiées lors du retour d’expérience de la mise en œuvre du texte actuel :

  • Non réalisation du marché unique des produits de construction, notamment en lien avec le processus de normalisation
  • Difficultés de mise en œuvre au niveau national, du fait des différences notables en matière de surveillance du marché
  • Complexité du cadre juridique/simplification non réussie, avec une difficulté d’appréhender la signification spécifique du marquage CE dans le cadre du Règlement Produits de la construction
  • Incapacité du RPC à répondre à des priorités plus larges, telles que la transition écologique et numérique, et la sécurité des produits

Remarques générales

La Fédération des Industries Mécaniques salue les intentions de la Commission européenne de vouloir intégrer dans le projet de révision de ce Règlement un volet environnemental et développement durable et de faciliter réglementairement la possibilité de digitaliser la transmission d’information au client et aux différentes parties prenantes lors de la vente du produit.

Cependant, de manière générale, la FIM considère que le texte proposé ne permet pas de répondre aux enjeux identifiés par la Commission pour justifier cette révision dont notamment :

  • La non-réalisation du marché unique des produits de construction (notamment harmonisation déficiente des normes).
  • La complexité et l’instabilité du cadre juridique.

En effet, la signification du marquage CE (performance vs. conformité), le renvoi généralisé vers des actes délégués et les différents types de norme applicable nous semblent des obstacles de taille à l’harmonisation et à la simplification voulues. De plus, la simplification proposée nous semble ineffective pour les PME.

De surcroît, le projet de révision risque de contribuer à l’affaiblissement du tissu industriel européen, et de porter atteinte à sa capacité de produire dans l’Union européenne des produits de construction, tout particulièrement pour ceux considérés critiques et/ou de sécurité, avec des risques de rupture de la chaîne d’approvisionnement, comme celle subie actuellement dans le secteur des semi-conducteurs.

En plus de ces commentaires d’ordre général, la FIM souhaite attirer l’attention sur plusieurs dispositions dont l’application serait trop complexe ou contreproductive. Pour cette partie, la FIM propose une série de recommandations.

Elargissement du domaine d’application

La Commission européenne opère un élargissement du domaine d’application par l’ajout de produits de construction à l’article 2 et par l’élargissement de la définition du produit de construction, en particulier en ce qui concerne les produits suivants :

  • 2.1 d) parties essentielles des produits couverts par le présent Règlement
  • 2.1 e) pièces ou matériaux destinés à être utilisés pour des produits couverts par le présent règlement, si le fabricant de ces pièces ou matériaux le demande

Nous considérons que ces deux ajouts n’apportent pas de valeur ajoutée à la sécurité des bâtiments. Le point 2.1 e) permet au fabricant de choisir lui-même l’application d’un régime juridique, ce qui semble contradictoire avec l’objectif du Règlement.

Proposition FIM

Nous demandons la suppression de ces deux alinéas.

Pour ce qui est de la définition du produit de construction, l’article 3.1 mentionne :

« produit de construction », tout article physique formé ou sans forme, y compris son emballage et sa notice d’utilisation, ou tout kit ou assemblage combinant ces articles, qui est mis sur le marché ou produit en vue d’être incorporé de manière permanente à des ouvrages de construction ou des parties de ceux-ci dans l’Union, à l’exception des articles qui sont d’abord nécessairement intégrés dans un assemblage, un kit ou un autre produit de construction avant d’être intégrés de manière permanente à des ouvrages de construction.

L’intégration de l’emballage dans la définition complexifie le projet de règlement et génère une contradiction entre l’objet du projet de Règlement (réglementation des produits de construction) et son domaine d’application. Plusieurs textes européens encadrent l’utilisation et la gestion des déchets produits par les emballages, dont la directive 94/62/CE établit les règles de l’Union européenne concernant la gestion des emballages et des déchets d’emballages et la Directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement. Par ailleurs, les emballages des produits de construction ne sont pas propres aux produits de construction.

Proposition FIM

Nous demandons la suppression des emballages de la définition des produits de construction.

Exigences applicables aux produits (articles 4 et 5)

Qu’il s’agisse des caractéristiques essentielles des produits (article 4) ou des exigences (article 5), la FIM estime essentiel que ces caractéristiques soient applicables à une famille ou catégorie de produits. Afin de faciliter l’application du futur Règlement, il est impératif de préparer, avec le support de l’industrie, un programme de travail avec des priorités en fonction des familles de produits de l’annexe V.

Proposition FIM

Nous recommandons qu’un programme de travail transparent sur les familles de produits et les exigences applicables soit préparé avec le concours des industries concernées.

Autres marquages (article 18)

L’article 18 interdit les autres marquages couvrant ou renvoyant à des spécifications techniques harmonisées, à des exigences relatives aux produits, à des caractéristiques essentielles ou à des méthodes d’évaluation incluses dans la zone harmonisée. Tout d‘abord, nous souhaitons alerter sur la terminologie utilisée. En effet, « marquage » ou « marking » (version anglaise) sont les termes juridiques pour le marquage CE. Il convient d’utiliser donc « marques »/ « marks » (version anglaise) pour faire référence aux marques nationales ou privées.

L’interdiction de marques couvrant les caractéristiques essentielles adressées dans les « spécifications techniques harmonisées, à des exigences relatives aux produits, à des caractéristiques essentielles ou à des méthodes d’évaluation incluses dans la zone harmonisée » est fondée. Cependant, nous estimons la rédaction de l’article 18 trop restrictive. Une marque nationale peut couvrir des aspects complémentaires à « des spécifications techniques harmonisées, à des exigences relatives aux produits, à des caractéristiques essentielles ou à des méthodes d’évaluation incluses dans la zone harmonisée » qui répondent à d’autres besoins des industriels utilisant les produits de construction. Tel est le cas lorsqu’une marque assure une traçabilité totale, de la production de la matière première jusqu’à l’incorporation du produit de construction sur chantier.

Proposition FIM

Nous recommandons amender le premier alinéa de l’article 18 comme suit :

« Les marquages marques additionnelles autres que le marquage CE, y compris les marquages privés, ne peuvent être apposés sur un produit que s’ils ne couvrent pas ou ne renvoient pas à des ne modifient pas le contenu des spécifications techniques harmonisées, à des exigences relatives aux produits, à des caractéristiques essentielles ou à des méthodes d’évaluation incluses dans la zone harmonisée. Les marques additionnelles peuvent couvrir les aspects complémentaires ou autres aspects non abordés dans des spécifications techniques harmonisées, des exigences relatives aux produits, des caractéristiques essentielles ou des méthodes d’évaluation incluses dans la zone harmonisée ».

Obligations environnementales des fabricants (article 22)

Les obligations de l’article 22 s’ajoutent aux obligations environnementales qui découlent de l’article 4, rendant l’application du règlement encore plus complexe. De plus ces obligations sont prévues dans le cadre national français grâce à la filière de responsabilité élargie du producteur de produits et matériaux de construction. Nous recommandons, qu’à la place de définir ces obligations par le biais d’actes délégués ou de normes harmonisées, de suivre l’exemple de la responsabilité élargie des producteurs qui fait partie de la législation de l’UE sur les emballages et de permettre à chaque Etat-membre de mettre en œuvre ses propres filières.

Proposition FIM

Ainsi, nous demandons que l’article 22.4 soit amendé comme il suit :

Afin de préciser Les obligations énoncées au paragraphe 2, la Commission est habilitée à compléter le présent règlement au moyen d’actes délégués conformément à l’article 87, en précisant ces obligations pour des familles et catégories de produits particulières. La Commission peut également formuler des demandes de normalisation visant à l’élaboration de normes harmonisées conférant une présomption de conformité aux obligations énoncées au paragraphe 2 pour une famille ou une catégorie de produits spécifique. Les obligations énoncées au paragraphe 2 ne s’appliquent pas avant qu’un tel acte délégué ou qu’une telle norme harmonisée ne soit applicable.  sont considérées remplies dès lors que le fabricant participe à un dispositif national de responsabilité élargie du producteur de produits et matériaux de construction ou à un système équivalent.

Base de données information produits (article 78)

L’article 78 pose le cadre d’une base de données dont l’objectif et l’intérêt ne sont pas clairs. Si l’objectif de cette base de données est de recueillir de l’information sur chaque produit, par le responsable de la mise sur le marché, il nous semble irréalisable. Dans le domaine de la construction, la base de données du projet est représentée par le BIM, la maquette numérique du bâtiment. Cette maquette fournit les informations nécessaires à la santé, sécurité et maintenance des ouvrages de construction.

De plus, l’accès aux données potentiellement sensibles par des pays tiers risque d’enfreindre des droits de confidentialité et de propriété intellectuelle, et cela malgré les conditions posées par l’article 78.

Actes délégués

La possibilité pour la Commission d’adopter des actes délégués est citée plusieurs fois dans le projet de règlement dont les articles :

  • 4.3 pour combler un vide normatif concernant les caractéristiques essentielles des produits
  • 4.4 afin d’établir les niveaux seuils et classes de performance en liaison avec les caractéristiques essentielles
  • 4.5 dans le but de modifier l’annexe I, partie A
  • 5.2 pour préciser les exigences relatives aux produits annexe I, parties B, C et D
  • 5.3 pour modifier l’annexe I, parties B, C et D
  • 6.1 afin de déterminer, pour chaque famille ou catégorie de produits, le système d’évaluation et de vérification applicable parmi ceux qui sont exposés à l’annexe V
  • 6.2 pour préciser les exigences et obligations figurant à l’annexe V pour une famille ou catégorie de produits donnée
  • 6.3 dans le but d’introduire des mesures d’évaluation ou de vérification supplémentaires dans les systèmes visés à l’annexe V
  • 11.3 pour modifier le modèle de déclaration de performances
  • 22.4 afin de préciser les obligations environnementales de l’article 22 pour des familles et catégories de produits particulières
  • 22.5 dans l’objectif d’établir des exigences spécifiques concernant l’étiquetage en matière de durabilité environnementale

Proposition FIM

Dans la mesure où le futur RPC sera un règlement cadre, complété au fur et à mesure par des actes délégués de la Commission, il nous apparaît nécessaire que la Commission consulte les industriels concernés lors du processus d’élaboration de ces textes, afin de prendre en compte les contraintes industrielles et celles inhérentes aux produits.

A télécharger

NI Position FIM révision du règlement produits de construction.pdf

Contact

Roxana TURCANU - rturcanu@fimeca.org

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